François Fornieri : acquitté et aigri, mais pas encore éliminé

François Fornieri (Photo : Belga Images)

La Cour d’appel de Liège a confirmé jeudi l’acquittement de l’entrepreneur liégeois François Fornieri. Le fondateur de l’entreprise pharmaceutique liégeoise Mithra était poursuivi pour un prétendu délit d’initié. Le tribunal a ainsi confirmé le verdict rendu en première instance en février de l’année dernière. En appel, Fornieri s’est vu infliger les mêmes charges qu’en première instance, à savoir une peine de 18 mois de prison avec sursis, une amende de 60 000 euros, la confiscation de plus de 230 000 euros et une interdiction d’exercer une activité professionnelle pendant trois ans. Après le verdict, François Fornieri a déclaré à la presse qui l’attendait qu’il était soulagé. « Je ressens beaucoup d’émotion. Je suis très rassuré par la justice belge car deux juges, pas les plus faciles, m’ont acquitté. C’est ce que je retiens. Beaucoup de choses ont été détruites. Je suis amer mais je travaille déjà sur d’autres projets. On verra bien. »

L’entrepreneur liégeois François Fornieri, fondateur de la société pharmaceutique cotée en bourse Mithra, disposait-il d’informations privilégiées concernant le lancement du médicament PeriNesta ? Oui, a estimé l’an dernier le tribunal correctionnel de Liège. A-t-il transmis ces informations privilégiées à son ami Samuel Di Giovanni, fondateur de la société de sécurité Protection Unit, afin qu’il puisse acheter des actions Mithra avant que le cours de l’action ne monte en flèche ? Non, a décidé le même tribunal, qui a acquitté l’homme d’affaires liégeois du délit d’initié. Il a été acquitté au bénéfice du doute, faute de preuves. La Cour d’appel a confirmé le jugement sans plus de commentaires.



Quels sont les faits ? L’information privilégiée dont disposait Fornieri concernait le lancement du médicament PeriNesta en 2018. Au cours du mois de décembre 2018, François Fornieri avait versé près de 900 000 euros à Samuel Di Giovanni, qui avait ainsi acheté des actions Mithra avant et après l’annonce du lancement du PeriNesta. Il a revendu ses actions en mars 2019, avec un bénéfice de moins de 10 000 euros. L’enquête judiciaire a mis Samuel Di Giovanni dans une position difficile. De telles enquêtes pénales n’étaient pas compatibles avec son statut de propriétaire de l’entreprise de sécurité Protection Unit. Par la suite, Di Giovanni a conclu un accord avec l’accusation, classant l’affaire. Fait remarquable, Fornieri a demandé le même arrangement, ce qui a été rejeté par le ministère public. Le flamboyant homme d’affaires liégeois n’a donc pas pu échapper à son procès.

Dans son verdict, le tribunal de première instance a déclaré que la position de François Fornieri en tant que CEO et actionnaire de Mithra le mettait effectivement en possession d’informations privilégiées susceptibles d’influencer le cours de l’action Mithra. « François Fornieri était au courant de tous les éléments susceptibles d’influencer le cours de l’action. », Le président du tribunal correctionnel a déclaré que « rien dans le dossier ne permet de conclure que François Fornieri a transmis des informations à Samuel Di Giovanni ». Les deux hommes étaient en contact régulier et s’appelaient plusieurs fois par jour, mais cela ne prouve rien en termes de délit d’initié, a ajouté le président. De même, rien ne prouve que l’achat par Samuel Di Giovanni d’un paquet d’actions Mithra ait été autre chose qu’un investissement classique. Samuel Di Giovanni a détenu ces actions pendant un certain temps avant de les vendre. « Les seuls faits incriminants sont deux messages WhatsApp qui ne prouvent pas que des informations privilégiées ont été transmises », a conclu le président du tribunal pénal. Ces éléments n’ont pas permis de dissiper les doutes quant à l’utilisation abusive d’informations privilégiées.

Avec ce jugement, Fornieri n’est pas encore complètement sorti d’affaire. Il y a aussi le dossier Publifin. En 2021, Fornieri a conclu un accord douteux et, selon le procureur, illégal, avec Stéphane Moreau, alors dirigeant de l’intercommunale liégeoise Publifin. Fornieri promet une prime généreuse à Moreau et, en contrepartie, acquiert gratuitement la filiale éolienne de l’intercommunale, société éolienne dont Moreau deviendra à nouveau l’administrateur délégué un peu plus tard. Une opération qui a profité exceptionnellement aux deux hommes mais dont l’intercommunale est sortie sans le sou. Une opération trop transparente qui s’est soldée par une plainte au pénal par le chef du PS Elio Di Rupo.

Tout au long de la procédure judiciaire, Fornieri a perdu le contrôle et la propriété de la société Mithra, qui développe des contraceptifs. M. Fornieri n’a plus été autorisé à participer aux conseils d’administration de Mithra pendant l’enquête judiciaire et s’est vu refuser l’accès aux documents de l’entreprise. La société a fait faillite et a finalement été cédée au groupe hongrois Gedeon Richter pour une somme symbolique.