En Belgique, AB Inbev est surtout connu pour ses marques Stella Artois et Jupiler. Mais entre-temps, la multinationale est devenue le leader mondial de la production de bière. Le contrôle belge d’AB Inbev est entre les mains de trois familles nobles : de Spoelberch, de Mévius et Van Damme. Leur contrôle du géant de la bière passe par plusieurs participations luxembourgeoises.
À l’origine, les trois familles n’avaient rien à voir avec Stella Artois. Au début du XXe siècle, la brasserie de Louvain appartenait à Edmond Willems. À sa mort, ce dernier laisse deux filles : Elise et Amélie. Willems veille à la bonne gestion de l’entreprise. Léon Verhelst devient directeur de la brasserie et le restera jusqu’en 1955. C’est Verhelst qui introduit avec succès la marque Stella Artois en 1926, alors comme bière spéciale de Noël. Entre-temps, Elise épouse le vicomte Adolphe de Spoelberch, tandis qu’Amélie choisit le déjà noble Eugène de Mévius.
Le groupe de brasseurs choisit de conquérir d’abord la Belgique. De nombreux petits brasseurs tombent dans l’escarcelle du géant de Louvain. La croissance à l’étranger commence alors. En 1968, Interbrew reprend la brasserie néerlandaise Dommelsch Bier et en 1970, la brasserie française Brasserie du Nord doit partir. Mais la grande concentration n’a lieu qu’à la fin des années 1980. À Liège, Jean-Théodore Piedboeuf s’est lancé dans la production de bière. Pour ce faire, il utilise les caves du château de Jupile pour faire reposer sa bière. Le nom de Jupiler est donc rapidement choisi. En 1987, la demande d’économies d’échelle a conduit à la fusion entre Pieboeuf et Artois. À l’époque, les deux groupes étaient déjà liés de diverses manières sur le plan opérationnel. C’est ainsi qu’est née Interbrew. Piedboeuf garantit à l’époque la bière la plus populaire, à savoir la Jupiler. La brasserie de Liège appartenait à la famille Van Damme. Lors de la fusion avec Artois, elle échange ses propres actions contre des actions Interbrew. La famille Van Damme devient immédiatement le troisième pilier familial du groupe brassicole. La brasserie Hoegaarden est reprise en 1989, suivie de la brasserie de gueuze Bell-Vue de la famille Vanden Stock-Collin en 1991.
Multinational
Dans son expansion, le groupe se concentre avec conviction sur l’Europe de l’Est. En 1991, il acquiert une brasserie hongroise. Trois ans plus tard, une acquisition en Roumanie suivie l’année suivante d’une acquisition en Bulgarie. En 1996, c’est au tour de l’Ukraine. La Chine et le Monténégro suivent en 1997 et la Russie et la Corée en 1998.
Cependant, la plus grande expansion étrangère d’Interbrew a lieu en 1995. Cette année-là, les actionnaires familiaux soutiennent pleinement l’acquisition par Interbrew du groupe brassicole canadien Labatt. Interbrew met sur la table pas moins de 57 milliards de francs. Mais cette acquisition a permis au groupe de se hisser au niveau des bières mondiales.
En 2004, Interbrew fusionne avec le groupe brésilien AmBev. Le nouvel ensemble prend le nom d’InBev. Le 12 juin 2008, InBev annonce qu’il a fait une offre de 46 milliards de dollars à Anheuser-Bush pour acquérir la plus grande brasserie des États-Unis. Lorsque InBev porte son offre à 52 milliards de dollars, le conseil d’administration d’Anheuser-Busch l’accepte le 13 juillet 2008. Cette acquisition fait d’InBev la plus grande brasserie du monde. AB InBev est née. Elle est suivie en 2016 par la méga-fusion avec le numéro deux mondial SAB Miller. Cela semble achever l’histoire de la croissance d’AB Inbev. Les rachats dans le secteur de la bière semblent désormais exclus. Une fois SAB Miller digérée, quelle proie AB Inbev aura-t-elle en tête ?
Relations avec les actionnaires
Les actionnaires d’AB Inbev sont statutairement limités aux héritiers directs des deux sœurs Willems et de la famille Van Damme. La branche la plus notable et la plus riche des actionnaires nobles est constituée par les enfants de Werner de Spoelberch et d’Elinor de Haas de Teichen. Cette dernière est la fille unique d’Elisabeth de Mévius. Un héritier de Spoelberch épousant un héritier de Mévius crée immédiatement une combinaison deux fois plus forte que les autres branches de la famille. Ancrée dans la région de Louvain, cette branche de la famille de Spoelberch a accumulé des parts dans le holding luxembourgeois Agemar. Le groupe familial compte actuellement 10 familles dans sa quatrième génération.
L’année 2004 est celle de l’entrée en bourse d’AB Inbev, avec une explosion de la valeur de la multinationale de la bière. Immédiatement, c’est aussi une année charnière pour les familles Van Damme, de Spoelberch et de Mévius, les trois principaux actionnaires du géant de la bière AB Inbev. Trois ans plus tard, en 2007, Alexandre Van Damme, en tant que premier actionnaire individuel d’AB Inbev, devient le Belge le plus riche, suivi par les familles de Spoelberch et de Mévius. Van Damme conservera sa première place pendant 13 ans, sans se soucier de l’attention des médias. Mais en 2020, Corona s’attaque sans ménagement au groupe brassicole AB Inbev. En bourse, la valeur d’AB Inbev s’effondre. Van Damme est éliminé de la première place par Eric Wittouck. Les familles de Spoelberch et de Mévius sont également durement touchées à cette époque.