Les millions Fortis oubliés d’Alexandre Van Damme

Maurice Lippens en 2008. (Photo : Belga Images)

Le tribunal des sociétés de Bruxelles va réexaminer dans les prochains mois le démantèlement de la banque déchue Fortis. Deux procédures judiciaires sont actuellement en cours. L’avocat Mischaël Modrikamen réclame 10,9 milliards d’euros à BNP Paribas et à l’État belge au nom d’un millier d’actionnaires de Fortis. Quant à Alexandre Van Damme, il attend toujours le jugement en appel concernant les 150 millions d’euros que ce riche actionnaire d’AB Inbev a perdus lors de la chute de Fortis en 2008, il y a donc 16 ans. Selon M. Van Damme, Fortis avait mal informé les actionnaires lors de l’augmentation de capital à l’automne 2007. Mais le tribunal de première instance ne l’a pas suivi. Fortis a informé les actionnaires « correctement et complètement » des risques, a déclaré le tribunal. M. Van Damme a fait appel de cette décision.

En octobre 2007, Fortis, et notamment sa figure de proue de l’époque, Maurice Lippens, demandait beaucoup d’argent frais pour financer le rachat de la banque néerlandaise ABN-Amro. Lippens fait appel à son réseau et Alexandre Van Damme accède à la demande. En octobre 2007, le holding luxembourgeois d’Alexandre Van Damme, Patrinvest, crée la filiale belge Patripart. Celle-ci a investi 209 millions d’euros dans l’augmentation de capital de Fortis. À l’époque, Van Damme était le citoyen le plus riche du pays et à la fois actionnaire et supporter d’Anderlecht. Fortis, quant à lui, était un sponsor régulier de l’équipe bruxelloise. Les dirigeants de la banque se sentaient chez eux à Anderlecht.



Mais la crise financière a frappé fort et vite. Moins d’un an plus tard, en septembre 2008, l’histoire de Fortis était terminée. Au cours de son deuxième exercice, Patripart a enregistré une perte de 205 millions d’euros, dont 187 millions de réductions de valeur sur la participation de Fortis. À ce moment-là, Fortis avait déjà sombré dans l’oubli et avait été réparti entre la Belgique, les Pays-Bas et la France à la suite d’interventions politiques. Patripart a été maintenue à flot grâce à 150 millions d’argent frais provenant de prêts internes. En 2014, cela s’est également terminé. Patripart a été absorbée par sa société mère luxembourgeoise Patrinvest.

En Belgique, Ageas a succédé à la branche assurance de Fortis. C’est également contre Agaes que Van Damme a intenté un procès en septembre 2012. Selon Van Damme, il a été délibérément mal informé sur l’augmentation de capital en 2007. Le tribunal n’a donc pas suivi cette affaire. Entre-temps, Maurice Lippens, aujourd’hui âgé de 81 ans, a complètement disparu. Il a réparti son patrimoine entre ses enfants et a vendu ses parts dans le groupe immobilier Compagnie Het Zoute à Gino De Raedt et Philippe Van de Vyvere.

Patrinvest est le principal holding de Van Damme au Luxembourg. Elle représente des actifs de 13 milliards d’euros. Le holding est contrôlé par la société en commandite Patri. Alexandre Van Damme, 62 ans, son frère Philippe, 60 ans, et Edwine Van der Straten Ponthoz, 81 ans, sont administrateurs de Patri. M. Van Damme, numéro deux de notre liste, est le plus grand actionnaire individuel du géant de la bière AB Inbev. Ce faisant, il collabore avec la famille Van der Straten. Sur le plan familial, sa fortune est ancrée dans le family office luxembourgeois SFI, qui représente 6 milliards d’euros d’actifs. Aux côtés de Van Damme, John Rasse, le fils de l’ex-mari d’Edwine Van der Straten, fait partie des administrateurs de SFI.